Notre presse et Addis-Abeba

Notre presse et Addis-Abeba

Le retour du Maroc à l’Union africaine est un acte diplomatique majeur pour le royaume. Comment la presse a accompagné cet évènement ?

Sans surprise la presse écrite marocaine, web comme print, n’a pas su accompagner comme il se doit l’évènement diplomatique marocain de la décennie. Heureusement, de rares exceptions tentent d’échapper à la médiocrité ambiante.

Qui a couvert quoi ?

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 En plus des médias audiovisuels publics (Al Oula et 2M) et Médi1 TV, Akhbar Al Yaoum, Les Inspirations Eco, Telquel et la Tribune Afrique étaient présents à Addis-Abeba pour couvrir le sommet. Le360 était le seul média digital à avoir fait le déplacement avec une équipe de deux confrères (un journaliste et un caméraman) ! Mise à part ces médias, les autres supports de presse n’ont pas saisi l’importance de ce moment politique et médiatique.

Les grands groupes de la presse privée (Maroc Soir, Eco-Média, Groupe Caractère, New Pub, etc…) se sont contentés de reprendre les dépêches de la MAP. La presse partisane a fait de même. Ainsi la revue rapide des numéros du 1er février dernier confirme ce premier constat :

  • La presse partisane: Al Alam, Al Bayane, Bayane Al Yaoum, Al Itihad: Sujet en UNE avec manchettes. Entre 2 à 6 pages, dont la reproduction complète du discours du roi (mais pourquoi vous faites ça). A l’exception de Libé, Les interviews sont absentes,
  • La presse populaire: Al Akhbar, Al Massae et Assabah: Les deux premiers quotidiens bouclent très tôt leur édition. Ils se sont contentés du service minimum avec une demie-page chacun. Le troisième est préoccupé par les jeux de hasard.
  • Akhbar Al Yaoum : Seul quotidien arabophone présent au sommet. Une page avec un récit fouillé sur les coulisses de la journée.
  • L’Economiste, ALM et Le Matin : RAS.
  • Les Eco : Seul quotidien francophone présent à Addis Abbéba. Il consacre 3 pages, dont une page pour un reportage-photos.
  • Le cas Al Ahdath Al Maghribia : mérite d’y consacrer quelques mots.

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  • La presse marocaine a été souvent habituée au journalisme-tout-frais-payés par les institutionnels (publics ou privés) pour tout déplacement à l’étranger.
  • La presse marocaine est devenue addict au journalisme embedded dans le cadre de voyages de presse. Ce type de déplacement où la com’ prend le dessus sur le journalisme. Ces déplacements sont légions pour visiter les instances de l’UE, l’OTAN, etc…
  • La presse marocaine manque d’autonomie. Le déplacement d’Addis Abebba était risqué. Le Maroc n’était pas assurer d’avoir gain de cause. Cette incertitude explique-t-elle le manque d’engouement des rédactions pour ce déplacement ? Les médias proches du makhzen attendaient-t-ils un signal pour faire le déplacement en force ? Ce qui est sûr, ce que la grande majorité des médias manque d’autonomie dans leur prise de décision interne. A l’image des partis politiques…
  • Historiquement, la presse tenue à l’écart par le palais. La presse marocaine était exclue des déplacements du roi Hassan II. Dans un contexte où la com’ royale de Mohammed VI est verrouillée et l’accès y est fermé à double tour face à la presse marocaine, les déplacements du roi à l’étranger sont le monopole des médias officiels. Le sommet de l’UA aurait pu être une occasion pour mettre fin à cette pratique, du côté de la presse. Or, les médias marocains ont préféré s’auto-exclure.

Chapeau à ceux qui ont fait le déplacement à Addis-Abeba. Pour les autres, ils étaient le reflet d’une presse marocaine, print comme digital, embourbée dans ses routines.

S.Lemaizi

@LemaizO

A lire aussi sur le blog : Le pluralisme de la presse marocaine

 

 

 

 

 

Les résolutions des journalistes pour 2015

Trois journalistes nous livrent leurs attentes pour l’année 2015 : Code de la presse, convention collective, accès à l’information, révision des subventions à la presse

Hassan BentalebHassan Bentaleb,journaliste au quotidien Libération

« L’accès à l’information »

Mes attentes pour 2015 sont de trois ordres. Premièrement, j’espère l’adoption de la nouvelle convention collective, dont le projet propose la hausse du salaire minimum des journalistes. Cette proposition devrait assurer une stabilité économique pour que les journalistes puissent exercer cette digne fonction qu’est le journalisme dans de meilleures conditions. Deuxième priorité est l’adoption du nouveau Code de la presse durant cette année. Enfin, le projet de loi sur l’accès à l’information doit être introduit dans le circuit législatif. Une presse libre et un travail journalistique respectable et professionnel ne peuvent exister sans la garantie d’un accès à l’information. En plus des trois éléments précités, l’Etat se doit de reconnaitre le rôle fondamental des médias dans la contribution à une société pluraliste.

Aziz ElEl HorHor, journaliste au quotidien Al Akhbar

« Le Code de la presse, une urgence…. »

L’élargissement du champ et de la pratique de la liberté de la presse sont les principaux enjeux pour notre secteur journalistique l’année 2015. Cela doit se traduire par la sortie des prochains textes relatifs à l’édition et la presse. L’adoption de ces projets, même avec leurs limites. À mon avis, il faut sortir ces textes dans les plus brefs délais car la législation actuelle est dépassée. L’adoption de la nouvelle convention collective est également urgente. Plusieurs secteurs ont renouvelé leurs conventions  collectives avec des avantages, sauf notre secteur. Surtout que la situation sociale des journalistes se dégrade de jour en jour. La chaine 2M commence à recourir à la sous-traitance dans son recrutement des journalistes. C’est un scandale !

Sara Bar-rhout, journaliste au quotidien Les Eco

« Dépendance de la publicité »

La presse au Maroc est malade ! Malade de son manque de moyens financiers malgré les subventions prévues par l’Etat, malgré les ventes bien qu’elles soient moins nombreuses que celles de la presse arabophone. La presse peut-elle continuer à vivre au Maroc ? Quelle soutenabilité pour le modèle économique d’organes de presse francophones face à une faiblesse du taux de lectorat francophone, face à la montée en puissance des médias électronique et face aux sensationnalismes qui fait légion dans la presse arabophone la propulsant chaque mois aux premières loges de nombre de diffusion. Nous avions perdu en 2013 : Actuel, Le Soir échos et en 2014 : Stratégie&Management plus connu sous le nom d’Essor Magazine. Ils ont tout simplement disparus, ne pouvant plus couvrir leurs charges. Conséquence ? Le secteur est devenu «malade» de sa dépendance de la publicité, seul gage de sa continuité. Je lui en souhaite un prompt rétablissement en cette année 2015.